L’Algérie : vers une nouvelle puissance économique et diplomatique
L’Algérie, longtemps perçue uniquement à travers le prisme de sa rente pétrolière, amorce depuis quelques années une véritable transformation économique, diplomatique et régionale.
Située stratégiquement entre l’Europe, l’Afrique et le monde arabe, l’Algérie cherche aujourd’hui à redéfinir sa place dans le jeu mondial.
L’histoire économique de l’Algérie ne peut être comprise sans évoquer l’héritage de la colonisation. De 1830 à 1962, la France coloniale a structuré l’économie algérienne autour de ses propres intérêts : accaparement des terres agricoles, exploitation des ressources minières et marginalisation des populations locales dans les circuits économiques.
Cet héritage a laissé des traces profondes dans la structure sociale et économique du pays, notamment une dépendance aux exportations de matières premières, une désindustrialisation forcée et une faible autonomie productive.
Depuis l’indépendance, l’Algérie a cherché à reprendre le contrôle de ses ressources, à travers des politiques de nationalisation et de planification économique. Ces efforts se poursuivent aujourd’hui dans le contexte de la mondialisation, portés par une volonté claire de rompre avec le modèle extractiviste hérité de la période coloniale.
Le modèle économique algérien est longtemps resté basé sur les exportations d’hydrocarbures, qui représentent encore aujourd’hui environ 90 % des recettes extérieures. Mais la chute des prix pétroliers en 2014 a agi comme un électrochoc, forçant l’État à réfléchir à un modèle économique plus résilient.
Depuis, des efforts ont été entrepris pour développer d’autres secteurs clés :
- L’agriculture : Avec plus de 8 millions d’hectares de terres cultivables, l’Algérie investit dans l’irrigation, les semences locales et les coopératives pour assurer une autosuffisance alimentaire durable.
- L’innovation : Le gouvernement mise sur la jeunesse en facilitant la création d’entreprises innovantes, en développant des technopoles, en créant des fonds de soutien à l’innovation et en poursuivant la digitalisation progressive de l’administration.
- L’industrie : Le tissu industriel est en pleine mutation, avec un retour de la production nationale dans des domaines comme l’agroalimentaire, le textile, ou encore la transformation des ressources minières.
Une politique d’investissement revisitée
Dans le cadre de l’ouverture progressive de l’Algérie à l’économie mondiale, divers obstacles réglementaires et structurels ont été levés. L’une des plus marquantes est l’abolition de la règle 51/49 %, qui limitait jusqu’à présent la part détenue par des capitaux étrangers dans les entreprises nationales.
Désormais, les investisseurs étrangers peuvent détenir la majorité des actions dans la plupart des secteurs. Des zones industrielles dédiées sont également créées, notamment dans le sud du pays, avec des avantages fiscaux et des infrastructures logistiques modernisées. Cette ouverture suscite un intérêt croissant de la part d’acteurs économiques étrangers, notamment chinois, turcs, qataris, émiratis et européens.
Un rôle régional affirmé
L’Algérie s’impose aujourd’hui comme une puissance régionale indépendante et médiatrice en Afrique du Nord et au Sahel. Elle joue un rôle déterminant dans plusieurs dossiers sensibles :
- Mali : Participation aux Accords de paix d’Alger en 2015 ;
- Libye : Promotion d’une solution politique indépendante des ingérences étrangères ;
- Sahara occidental : L’Algérie soutient une solution basée sur le droit à l’autodétermination du peuple sahraoui, tandis que le Maroc revendique la souveraineté sur ce territoire.
Sa diplomatie, à la fois pacifique et ferme, renforce son poids au sein de l’Union africaine, où l’Algérie est l’un des membres les plus écoutés en matière de sécurité et de développement.
La relance de la diplomatie énergétique
La crise ukrainienne pousse l’Europe à diversifier ses sources d’approvisionnement en gaz. Dans ce contexte, l’Algérie retrouve une place stratégique, grâce à ses gisements comme Hassi R’mel et ses pipelines transméditerranéens.
Des accords ont ainsi été renforcés avec l’Italie, via ENI, pour augmenter les volumes de livraison. Parallèlement, le réseau de transport gazier est modernisé pour garantir une meilleure fiabilité.
L’Algérie s’engage également dans la diversification énergétique, en développant des projets autour du solaire et de l’hydrogène vert, en partenariat avec des acteurs internationaux. L’objectif : transférer des savoir-faire et réussir une transition énergétique tout en renforçant sa souveraineté.

Source : Ministère de l’énergie d’Algérie
Les limites persistantes
Malgré ces avancées, plusieurs défis restent à relever. Le poids de l’économie informelle et la persistance de la bureaucratie freinent encore le plein potentiel du pays.
En dépit de la croissance des revenus hors hydrocarbures, l’économie demeure encore largement dépendante du secteur énergétique. De plus, la réforme des politiques publiques reste instable, impactant la gouvernance économique, l’efficacité administrative et l’amélioration du système éducatif.
Conclusion : La puissance algérienne de demain
L’Algérie ne peut se contenter de son rôle traditionnel de fournisseur d’énergie. Elle ambitionne de devenir une nation dynamique, pleinement investie dans son rôle économique, diplomatique et stratégique.
La puissance de l’Algérie est encore en construction, mais les fondations sont posées : une volonté politique affirmée, une jeunesse mobilisée et une ouverture modernisée dessinent les contours d’un nouveau chapitre.
Une nation déterminée à défendre ses intérêts, à capitaliser sur ses atouts et à s’imposer comme un acteur clé au Moyen-Orient et en Méditerranée.