La Russie, une future puissance minière

La Russie, une future puissance minière
Publié le 6 mars 2025 par Vincent Barret

La Russie est avant tout connue pour ses vastes réserves de pétrole et de gaz, ainsi que son rôle central dans la production mondiale d’hydrocarbures. Cependant, elle possède également un immense potentiel géologique qui en fait l’un des plus grands pays miniers au monde.

Largement privatisé, le secteur minier russe fait face à de nombreux défis, notamment l’obsolescence de ses infrastructures, le manque d’investissements et la pénurie de main-d’œuvre qualifiée, des difficultés exacerbées par les conséquences de la guerre en Ukraine.

Hormis la filière de l’uranium, placée sous le contrôle exclusif de Rosatom, l’agence publique russe de l’énergie atomique, le pays compte près de 17 000 entreprises actives dans l’économie extractive, soulignant ainsi le poids de ce secteur dans l’économie nationale. Parmi elles, environ 3 000 sont spécialisées dans l’extraction de minerais métalliques, tandis que 800 se consacrent à l’exploitation du charbon.

Sur l’ensemble des entreprises du secteur minier et des carrières, 16 300 sont détenues par des acteurs russes, environ 200 appartiennent à des entreprises étrangères ou à des partenariats entre investisseurs locaux et internationaux, et une centaine sont directement contrôlées par des autorités publiques, qu’elles soient régionales ou municipales.

En parallèle, la Russie compte également 39 800 entreprises impliquées dans la transformation des métaux.

L’organisation institutionnelle de ce secteur repose sur le ministère des Ressources naturelles et de l’Environnement (Minprirody), appuyé par deux agences fédérales : Rosnedra, chargée de la gestion des ressources souterraines, et Rosprirodnadzor, en charge de la supervision environnementale. Ce cadre réglementaire permet d’encadrer et de contrôler les activités extractives à l’échelle nationale, illustrant ainsi l’importance stratégique des matières premières pour l’économie russe.

Depuis plusieurs années, la Russie confirme son rôle de puissance minière majeure. Son territoire immense recèle des réserves de minerais considérables, tandis que la demande mondiale en matériaux, portée par le développement technologique et la transition écologique, ne cesse de croître depuis le début du XXIe siècle.

Effectivement, on devrait s’attendre à une croissance exponentielle de la demande des métaux à l’avenir qui vont être nécessaire pour les infrastructures d’énergie, de communication, de transport, etc. L’adoption massive des « technologies vertes », telles que les véhicules électriques et les énergies renouvelables (éolien, solaire), aboutit à une augmentation supplémentaire de la demande globale de métaux.

Parmi les nombreux minerais, le territoire russe comprend d’importants gisements de diamant, d’or, de platine, de palladium, de charbon, ainsi que de vastes réserves de minerai de fer, de manganèse, de chrome, de nickel, de titane, de cuivre, d’étain, de plomb ou encore de tungstène. Tout cela représenterait une valeur totale équivalente à 75 000 milliards de dollars américain, faisant potentiellement de la Russie le pays le plus riche au monde.

La Russie est aussi le deuxième producteur d’aluminium, même si la Chine détient un quasi-monopole sur ce métal. En Sibérie, les ressources en cuivre offrent d’excellentes perspectives avec des dizaines de millions de tonnes anticipées.

Le pays dispose d’importantes réserves minières, se classant parmi les leaders mondiaux pour plusieurs ressources stratégiques. Elle détient notamment la troisième réserve mondiale de nickel (7,5 millions de tonnes), ainsi que les quatrièmes réserves d’uranium (662 000 tonnes) et de cuivre (62 millions de tonnes).

En plus de cela, la Russie disposerait de 16 % des réserves mondiales de béryllium, 11 % du chrome, 22 % du cuivre, 38 % du manganèse, 79 % du mercure, 15 % du nickel, 16 % du niobium, 10 % du platine, 7 % du tantale, 49 % du vanadium, 24 % du zinc, ainsi que de réserves importantes en métaux rares comme le rhodium.

Bien que le marché du cuivre soit largement dominé par le Chili et le Pérou, qui représentent à eux seuls 40 % de la production mondiale, ce métal reste essentiel à nos sociétés modernes. Grâce à ses propriétés uniques, il est un élément central des infrastructures, du câblage, des transports et des équipements électriques et électroniques, tant industriels que grand public. La demande mondiale de cuivre devrait d’ailleurs croître de 275 à 350 % d’ici 2050, renforçant ainsi le caractère stratégique des gisements russes pour les décennies à venir.

Dans les minerais stratégiques, la Russie est leader ou dispose de gisements de classe mondiale dans les platinoïdes, le titane, les métaux de base, les terres rares, le cobalt, l’uranium, le cuivre si stratégique pour son voisin chinois, etc.

De plus, elle a la chance de voir ses territoires terrestres et maritimes stratégiques s’agrandir au fur et à mesure que les voies navigables du nord offrent de nouvelles perspectives pour acheminer du fret maritime entre Arkhangelsk, Mourmansk, la Sibérie et l’Asie, entre l’Asie et l’Europe mais aussi pour atteindre, avitailler et assurer une continuité territoriale entre le nord-ouest du pays et les zones riches en matières premières stratégiques au nord et au nord-est.

Depuis une dizaine d’années, la Russie mène une politique minière ambitieuse, cherchant à diversifier ses sources de revenus et à réduire sa dépendance aux hydrocarbures. Aujourd’hui, les exportations d’hydrocarbures constituent encore environ 60 % du budget fédéral russe, réparties comme suit : pétrole brut (26,4 %), produits pétroliers raffinés (16,5 %), gaz naturel (10,5 %) et métaux ferreux (5,3 %).

Les effets de cette dépendance ont été mis en évidence par la guerre en Ukraine, qui a entraîné la fin des exportations de gaz naturel russe vers l’Union européenne (UE) et l’arrêt des importations de pétrole par voie maritime de la part des pays européens. Face à ces sanctions, la Russie a dû réorienter ses exportations énergétiques vers d’autres marchés, notamment la Turquie, l’Inde, l’Arabie saoudite et la Chine.

Avant le début du conflit, la Russie fournissait à l’Europe environ 25 % de son pétrole, 50 % de son charbon et près de 40 % de son gaz, illustrant le poids crucial qu’elle occupait dans l’approvisionnement énergétique du continent.

Ainsi, de l’exploitation des gisements de diamants et la maîtrise de leur chaîne de valeur dans les hautes technologies à la relance de la filière houillère, la Russie entend poursuivre le développement et la modernisation d’un secteur industriel désormais stratégique et relativement épargné par les sanctions internationales.

Cette orientation présente deux avantages majeurs, particulièrement dans le contexte actuel d’isolement partiel et de restrictions économiques. D’une part, les exportations minières offrent une plus grande flexibilité que celles des hydrocarbures, notamment grâce à la modularité des voies d’acheminement. D’autre part, l’expertise russe dans ce domaine constitue un levier d’influence géopolitique croissant, notamment en Afrique et au Moyen-Orient, où les économies sont en pleine expansion.

Les métaux cités sont utiles pour une multitude de secteurs. Les trois secteurs les plus importants restent l’automobile, l’aéronautique et le secteur des semi-conducteurs. L’automobile est celui qui en souffrira sûrement le plus car il nécessite beaucoup de métaux différents.

Ainsi, l’aluminium, le cuivre, le platine et le palladium sont tous utiles à la fabrication d’automobiles à propulsion thermique, notamment pour les pots catalytiques. Pour les véhicules électriques, le cobalt et le nickel sont indispensables aux batteries.

Déjà entravé par la pénurie de puces électroniques depuis septembre 2021, le secteur automobile allemand a déjà suspendu des lignes de production en raison d’un problème d’approvisionnements de ses sous-traitants en Ukraine et la situation pourrait s’aggraver.

L’aéronautique dépend également des métaux russes, et en particulier des éponges de titane. Les principaux groupes aéronautiques ont pour principal fournisseur la société russe VSMPO-Avisma (environ 30 % du marché mondial du titane), seul Boeing a pour le moment décidé de mettre fin à ses réapprovisionnements.

Cette société fournit environ 50 % des importations de l’aéronautique mondial et légèrement moins pour les acteurs français. Dans ce secteur, les industriels ont par précaution constitué des stocks qui leur permettent de gérer une problématique de pénurie à court terme.

Pour ce qui est des semi-conducteurs, leur production demande deux ressources principales, le palladium et le gaz néon, ce dernier étant produit à 50 % en Ukraine. Les deux entreprises principales, Ingas et Cryoin, ont déjà fermé leurs sites. On peut donc s’attendre à de grandes difficultés pour ce secteur.

Cependant, le secteur fait face à des défis structurels considérables, aggravés par les sanctions internationales. Le premier obstacle majeur est la dépendance technologique. Sans alternative viable, le tarissement des approvisionnements en technologies étrangères pourrait entraîner une paralysie des projets extractifs et un déclin progressif de l’industrie minière russe dans un environnement de plus en plus compétitif.

Un exemple frappant de cette dépendance est l’utilisation intensive de logiciels spécialisés pour la conception et la fabrication assistées par ordinateur, essentiels aux groupes miniers russes.

Depuis deux décennies, la Russie a investi près de 3 200 milliards de roubles (environ 50,3 milliards d’euros) pour moderniser son industrie de l’acier et restaurer des capacités de production perdues dans les années 1990. Toutefois, ces investissements ont principalement bénéficié à des fournisseurs étrangers, comme l’allemand Siemens, qui a depuis quitté le pays, mettant en péril la compétitivité de l’industrie minière russe sur le marché international.

Un autre défi de taille concerne l’obsolescence des infrastructures. Le secteur repose en grande partie sur des équipements hérités de l’époque soviétique, souvent vieillissants et très polluants. La logistique, en particulier, demeure un point critique, avec des réseaux de transport fragiles qui compliquent l’acheminement des matières premières et entravent le bon fonctionnement de l’industrie extractive.

Le réseau ferroviaire russe souffre de plusieurs fragilités structurelles : une absence de vision stratégique cohérente, un manque de concurrence dans le secteur, des investissements peu fiables et une capacité insuffisante pour gérer les flux croissants. De plus, le déficit en ponts, infrastructures essentielles à la continuité et à la viabilité des chaînes de transport, contribue à l’état de sous-capacité du réseau, limitant ainsi durablement les possibilités d’augmentation des flux.

Par ailleurs, les infrastructures portuaires russes demeurent sous-développées, ce qui entrave considérablement l’augmentation du transport maritime de minerais et de métaux, un enjeu crucial pour l’exportation des ressources naturelles du pays.

Malgré ces faiblesses, l’État russe n’a toujours pas mis en place une politique d’investissements d’envergure pour moderniser ces infrastructures. Cette inertie s’explique en partie par la diversité des acteurs du secteur minier et la variété des ressources exploitées, rendant difficile l’élaboration d’une stratégie d’investissement cohérente à l’échelle nationale.

De plus, les dysfonctionnements persistants entre le pouvoir fédéral et les institutions régionales et locales ralentissent la mise en œuvre des projets infrastructurels, compromettant ainsi le développement du secteur minier à long terme.

Le problème de l’infrastructure de transports affecte particulièrement les projets miniers en Arctique et en Extrême-Orient. L’absence de la puissance publique amène les industriels à directement investir sur ces infrastructures comme Norilsk Nickel qui consacre 6,5 milliards de roubles à la modernisation de la ligne ferroviaire qui relie le district industriel de Norilsk au port de Doudinka.

De fait, l’infrastructure ferroviaire, qui a peu évolué au cours des trois dernières décennies, doit être modernisée et étendue pour accompagner l’augmentation programmée des flux de métaux et de minerais produits. La Sibérie illustre ce défi : en 2020, 144 Mt de marchandises ont ainsi circulé sur la partie sibérienne du réseau ferroviaire. La modernisation en cours du réseau dans la région doit permettre de porter ce volume à 180 Mt pour 2025.

Or, la tâche s’annonce titanesque en raison de plusieurs facteurs : des coûts très élevés relatifs à la construction d’une ligne ; des coûts fixes liés à l’entretien du réseau ; une pénurie de main-d’œuvre ; et l’absence de mécanismes de financement permettant un développement pérenne.

Pour combler son retard technologique face à ses concurrents internationaux, la Russie doit engager une transformation en profondeur de ses opérations minières. Cela passe par la robotisation, l’intégration de l’internet des objets (IoT) pour optimiser les coûts et améliorer la productivité, ainsi que par la digitalisation des systèmes de production.

L’adoption de ces nouvelles technologies implique également une montée en compétences des travailleurs du secteur, nécessitant la mise en place de formations initiales et continues adaptées aux nouveaux procédés. Or, depuis le début du XXIᵉ siècle, le secteur minier russe peine à faire de l’innovation un levier central de sa modernisation, compromettant ainsi la pérennité des transferts technologiques.

Toutefois, dans un environnement de plus en plus compétitif, les entreprises privées russes, avec l’appui des autorités publiques, tentent de rattraper ce retard en adoptant des techniques d’exploration géologique plus avancées et en accélérant l’intégration de nouvelles technologies dans les procédés d’extraction et de traitement des minerais.

Par ailleurs, la Russie cherche à résoudre des problématiques structurelles liées au développement économique des régions minières, qui peinent à maintenir leur compétitivité. Ces dernières décennies, des coûts de production élevés et un appareil industriel moins performant ont pesé sur la rentabilité du secteur. En définitive, ces défis ne pourront être relevés sans une politique publique volontariste et ambitieuse, visant à moderniser l’ensemble de la filière.

Par conséquent, pour donner une vision cohérente au projet de transformation industrielle du pays, le gouvernement russe promeut l’Initiative technologique nationale (Nacional’naâ Tehnologičeskaâ Iniciativa) qui ambitionne de renforcer l’innovation et créer les conditions d’une présence du pays sur les marchés de haute technologie à l’horizon 2035. Toutefois, ce programme fédéral ne vise pas explicitement le secteur minier.

Donc, l’ensemble de ces initiatives privées ou publiques ne conduit pas à une modernisation systémique du secteur. L’intégration entre l’université, l’industrie et les autorités publiques reste insuffisante. En outre, aux problèmes endémiques de l’économie russe (corruption, manque d’attractivité, manque de personnel, manque d’infrastructures et d’investissement, faible productivité) se sont ajoutées les sanctions depuis 2014, même si la politique publique de la « substitution aux importations » a permis de répondre, jusqu’à présent, aux besoins du secteur minier.

Cependant, les vagues de sanctions imposées depuis février 2022 perturbent le fonctionnement du secteur et les projets en cours de développement. Les problèmes d’accès à certaines technologies mais aussi aux capitaux ralentissent l’essor de l’activité minière dans le pays.

Avec tous ses défis structurels, cela explique pourquoi le président russe Vladimir Poutine, lorsqu’il répondait aux questions de Pavel Zaroubine, correspondant de la télévision publique VGTRK assurant le relais de la parole officielle a déclaré : « Nous disposons incontestablement, en ordre de grandeur – je tiens à le souligner –, de plus de ressources de ce type que l’Ukraine. La Russie est l’un des leaders incontestés en matière de réserves de métaux et de terres rares. »

« Nous serions heureux de travailler avec tous les partenaires étrangers, y compris américains », a-t-il soutenu, évoquant des projets « à forte intensité de capital”, sous-entendu générateurs de profits. Avant d’ajouter : « D’ailleurs, il en va de même pour les nouveaux territoires [l’Ukraine occupée] : nous sommes prêts à y attirer les investisseurs étrangers. »

En outre, le président a suggéré d’envisager des projets communs avec les États-Unis pour l’extraction de l’aluminium, par exemple dans le territoire de Krasnoïarsk, Moscou est prêt à fournir 2 millions de tonnes au marché américain. Le fait est que le marché de l’aluminium aux États-Unis est en déficit notable : le pays produit environ 750 000 tonnes, alors que la consommation annuelle est de plus de 4 millions de tonnes.

Les États-Unis importent environ 70 à 80 % de l’aluminium, comblant le déficit principalement par des approvisionnements en provenance du Canada, des Émirats arabes unis, de la Chine et d’autres pays.

Poutine a déclaré la nécessité d’augmenter plusieurs fois leur production. Le développement de cette industrie en Russie est la base de ressources la plus importante pour l’économie moderne, car les métaux rares sont demandés dans la microélectronique, l’énergie, dans la création d’infrastructures de l’économie numérique et dans de nombreux secteurs des sphères civiles et de défense, a déclaré Vladimir Poutine.

En substance, nous parlons de presque tous les secteurs du nouvel ordre technologique, qui définit la dynamique du progrès mondial. D’ici 2030, la Russie souhaite mettre en place un cycle complet de traitement des terres rares ; cela est nécessaire au développement de l’économie du pays et de l’industrie de défense, ainsi qu’à une concurrence réussie sur les marchés mondiaux.

Afin d’accroître le potentiel de l’industrie nationale dans le domaine des nouveaux matériaux, un projet national de leadership technologique a été lancé cette année. Cela s’appelle « Nouveaux matériaux et chimie ». En particulier, dans le cadre du projet national, il est nécessaire de mettre en place toute la ligne, le cycle complet de l’industrie des métaux stratégiques et des terres rares, pour assurer leur extraction et leur transformation jusqu’à la production de produits finis de haute technologie à haute valeur ajoutée.

En effet, environ 40 % des réserves mondiales de terres rares et environ 60 % de leur production mondiale se trouvent en Chine. Selon Rosnedra, dans la Fédération de Russie, les réserves de terres rares en 2024 étaient estimées à 28,7 millions de tonnes dans 18 gisements explorés. Cela représente 20 % des réserves mondiales. Cependant, la part de la Russie dans la production sur le marché mondial ne dépasse pas 1% et la transformation de ces métaux dans le pays est pratiquement inexistante.

Comme l’ont expliqué à plusieurs reprises les départements et les experts compétents, outre les importantes dépenses d’investissement déjà engagées aux premiers stades de la mise en œuvre de tels projets, la Fédération de Russie manque de technologies industrielles éprouvées pour le traitement des matières premières, et les gisements sont situés loin des infrastructures.

Les entreprises s’inquiètent à la fois des perspectives incertaines concernant la demande pour ces métaux et, par conséquent, du risque de gel d’énormes investissements. Jusqu’à présent, l’intérêt pour cette industrie se limite presque exclusivement aux entreprises publiques.

La plupart des grands projets liés aux terres rares sont aujourd’hui pratiquement gelés. Parmi eux se trouve le gisement de niobium et de terres rares de Tomtorskoye (propriété des dirigeants du groupe IST d’Alexander Nesis) en Yakoutie, qui dispose d’une estimation préliminaire des réserves de 11,4 millions de tonnes de minerai contenant 0,7 million de tonnes d’oxyde de niobium et 1,7 million de tonnes d’oxydes de terres rares.

Le gisement d’Ak-Sugsky à Touva dispose de réserves de 78 000 tonnes de molybdène et de 83,3 tonnes de rhénium. L’actif appartenait à la structure Intergeo de Mikhail Prokhorov, mais en 2024, Rosnedra a décidé de révoquer la licence de la société en raison d’une violation du délai de construction de l’infrastructure.

À la fin de l’année dernière, une structure de Rostec a remporté l’enchère pour le droit d’exploiter le gisement.

“Jusqu’à présent, les tentatives de mettre en œuvre sur notre territoire un cycle complet de production de terres rares ont échoué”, observe le journal économique Monocle. Dans un article approfondi, le titre relaie l’inquiétude d’un responsable du comité chargé des ressources naturelles à la Douma, la chambre basse du Parlement russe : “Si l’attitude des autorités à l’égard de ce secteur n’évolue pas, il n’y aura que deux grandes puissances, les États-Unis et la Chine, et nous resterons à la marge.” 

En effet, dispose aujourd’hui d’une chaîne technologique complète qui comprend l’extraction et le traitement du minerai, sa séparation en oxydes et en terres rares individuelles, la production de matériaux et d’alliages et la fabrication de produits finis. Par ailleurs, depuis 2012, la Chine a lancé un programme de grande envergure pour soutenir ce secteur de l’économie. L’accès aux terres rares est devenu un outil politique largement utilisé par la Chine, qui introduisait des licences d’exportation et subventionnait ses producteurs.

Tous les acteurs du marché des terres rares, comme la Chine, ne peuvent pas se vanter de disposer d’une chaîne de production complète. L’Australie, par exemple, n’ayant que la première transformation, n’a aucun problème à envoyer ses produits à l’exportation. La Russie connaît la situation la plus difficile.

L’URSS produisait 8 500 tonnes de terres rares par an. L’exploitation minière a été réalisée en RSFSR, au Kirghizistan et au Kazakhstan, et le traitement a également été effectué en Ukraine et en Estonie. Après 1991, la plupart de ces capacités ont été délocalisées à l’étranger, les chaînes de production ont été brisées et, ces dernières années, de nombreuses sanctions se sont ajoutées aux problèmes du secteur.

C’est pour cela que Poutine a nommé Kirill Dmitriev comme envoyé spécial pour la coopération internationale en matière d’économie et d’investissement. Directeur du fonds souverain russe d’investissement, Dmitriev avait pris part aux consultations le 18 février à Riyad, en Arabie saoudite, où Russes et Américains avaient manifesté leur volonté de rétablir des relations économiques.

Kirill Dmitriev, diplômé de Stanford et Harvard, directeur du Fonds d’investissement direct russe (RDIF) et proche de Vladimir Poutine. Il a été nommé avec l’assistant de Vladimir Poutine, Youri Ouchakov et le chef du Service de renseignement extérieur (SVR) Sergueï Narychkine, comme faisant partie de l’équipe des « poids lourds » des négociations.

Selon Dmitriev, certaines entreprises américaines devraient revenir sur le marché russe au deuxième trimestre 2025.